Développement
économique
transfrontalier
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Thèmes transversaux du développement économique transfrontalier
De ce fait, il est important de garder à l’esprit que la compétitivité
et l’attractivité sont des notions relatives, évolutives, qu’il s’agit de
juger en contemplant le territoire transfrontalier dans sa globalité
territoriale, démographique, administrative, fiscale et réglementaire.
La tâche se révèle ainsi d’une grande complexité. D’autant que parler
de compétitivité revient à parler d’attractivité, une notion qui agrège
« indicateurs économiques objectifs et perception des investisseurs
étrangers à l’égard de la compétitivité de l’économie»
85
. Cette donnée
est à considérer lorsqu’on observe la situation des territoires frontaliers
français. Il serait en effet erroné d’appliquer une grille de lecture purement
économique et d’écarter tout facteur de proximité géographique,
historique, culturelle ou linguistique.
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Les sociétés à capitaux allemands sont ainsi fortement présentes
en Moselle-Est et en Alsace
, de même que les entreprises
belges dans le
Nord-Pas de Calais
.
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Cette irrigation des territoires frontaliers français par les entreprises
du pays voisin n’est toutefois pas nettement visible
dans les
zones limitrophes de l’Espagne et de l’Italie
.
La proximité n’est donc pas déterminante et l’effet frontière continue,
malgré les opportunités (fournisseurs, sous-traitants, clientèle, etc.) et
complémentarités existantes ou potentielles, à constituer une barrière
pour les PME.
Serait-il alors nécessaire de mettre en place des
systèmes de «zones
franches »
ou d’expérimentation aux frontières afin d’harmoniser,
sur un espace circonscrit, les conditions cadres et promouvoir un
développement équilibré pour les territoires transfrontaliers ? La question
divise. La mission Blanc Keller Sanchez Schmid
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a préconisé en 2010
d’instaurer des zones économiques à statut spécifique. Cependant, de
tels dispositifs seraient difficilement envisageables tant en raison du
principe d’égalité des territoires, que de leur encadrement strict par la
Commission européenne (zones d’aides à finalité régionale).
Une solution serait en revanche de considérer les divergences de
part et d’autre des frontières comme des facteurs de circulation
et de flux entre ces territoires, des opportunités d’échange
entre entreprises locales et un gage d’attractivité du territoire
transfrontalier pour les capitaux étrangers, qui peuvent tirer parti des
avantages de chaque versant.
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L’Alsace, dans sa stratégie « Alsace 2030 »
, imagine ainsi
la possibilité d’expérimenter
un
e « zone de convergence
réglementaire » pour favoriser l’intégration de l’espace du
Rhin Supérieur, grâce à un assouplissement des barrières
réglementaires.
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Cette réflexion rejoint l’idée de zones économiques
transfrontalières intégrées
, avec un choix possible, pour les
entreprises (et pour le salarié qui les choisit) qui s’y implanteraient,
du droit de l’un ou l’autre côté de la frontière.
85
AFII, DG Trésor et CGET,
Tableau de bord de l’attractivité de la France
, Édition 2014, p.7
86
http://www.diplomatie.gouv.fr/fr/IMG/pdf/Rapport_transfrontalier_synthese.pdfEn bref…
Les territoires frontaliers français présentent un problème
de compétitivité clairement établi vis-à-vis de leurs voisins,
principalement sur les frontières nord et est de l’Hexagone
(de Dunkerque à Genève), qui se traduit en termes de PIB par
habitant, de taux de chômage ou de captage d’Investissements
Directs à l’Étranger (IDE). Les entreprises mettent
principalement en avant, au-delà des différences fiscales
et sociales (coût du travail), l’instabilité normative dans ces
domaines. Toutefois, ce problème de compétitivité est relativisé
par certaines dispositions avantageant les territoires français,
dont le crédit d’impôt recherche ou le statut de Jeune entreprise
innovante. De plus, si les réformes en cours participent à
l’instabilité normative, celles-ci sont néanmoins orientées vers
un effort de simplification. Enfin, en transfrontalier, il reste
extrêmement complexe d’apprécier la réelle compétitivité des
territoires français face à leurs voisins, celle-ci étant nuancée
par les propres conditions cadres du voisin, le secteur d’activité
(plus ou moins règlementé, concurrentiel, mondialisé, etc.) et la
stratégie propre de développement de l’entreprise.